EN FINIR AVEC
LA MYTHOLOGIE MIGRATOIRE
Par Jean MESSIHA
1 – Introduction
La France, vieux pays d'immigration, est en plein doute sur sa vocation de terre d'accueil et les raisons abondent pour expliquer cette remise en cause qui trouble profondément une partie de nos élites politiques, intellectuelles et artistiques. Le débat sur l'immigration a deux grands volets : l'identité et l'économie. Inutile de s’étendre sur le premier volet, toujours propice à des débats sans fin avec nos adversaires, qui n’hésitent pas à le passionner tout en le ponctuant d’accusations infâmantes. Tenons-nous en à ce qui est vérifiable et donc indiscutable. Cela est d’autant plus important que les preuves de notre discours existent mais que, paradoxalement, notre mouvement ne les a jamais véritablement exploitées politiquement.
Pour toute une école de pensée, aujourd’hui omnipotente en France et en Europe, l'immigration est obligatoirement et structurellement bénéfique au pays d'accueil et en simplifiant (mais pas tant que cela) son raisonnement est le suivant : « les migrants sont des travailleurs motivés et des consommateurs nouveaux qui alimentent notre système économique et constituent la relève d'une population vieillissante qui aura besoin d'eux pour payer ses retraites ». On peut ajouter que, déterminés à se faire « une place au soleil », ils bousculent un peu une population établie et la force à « se bouger » pour rester « dans la course » à la promotion sociale.
Notre mouvement dans son ADN, diffère fondamentalement des inconditionnels de « l'immigration c'est bien », qu'ils appartiennent au camp de « la France est à tout le monde » ou à celui du « les migrants c'est bon pour le business » car en cette matière comme en tant d'autres, une évidence s’impose : cela dépend. De quoi ? En fait, des migrants eux-mêmes. Certes, mais où donc cette discussion nous mène-t-elle sinon à l'éternel débat entre immigration « choisie » ou « subie » ? Il est, en réalité, temps d'établir le bilan de 50 ans d'immigration en commençant par faire exploser la simplicité outrancière du terme « immigration ».
2 – Le constat
2.1. L’immigration : quels chiffres ?
Les immigrationnistes nous serinent que l’immigration dans notre pays reste modeste sur le long terme et « nous désintoxiquent » avec des données « rassurantes ». Ainsi s’en tenant à certaines données de l’INSEE el nous affirment que les « immigrés » ne représentent qu’environ 6 millions de personnes soit un petit peu moins de 10% de la population. Le problème provient du décalage exorbitant qu’il existe entre la modestie de ces chiffres et la réalité visible et perçue par tout un chacun. En clair, nos yeux et nos oreilles nous disent une vérité toute autre.
La définition de l’immigré par le Haut Commissariat à l’Intégration et repris par l’INSEE est : « une personne née étrangère à l'étranger et résidant en France ». Fort bien. Le premier problème est que cette définition exclut d’emblée les enfants d’immigrés puisque ceux-ci sont comptabilisés dans une autre catégorie. De là la première cause du décalage entre les chiffres et la réalité : les enfants d’immigrés représentent 7,3 millions de personnes, soit 11% de la population française. Si l’on s’en tient donc uniquement au pourcentage des immigrés de première génération (6 millions) et de leurs enfants (7,3 millions) nous arrivons au pourcentage impressionnant de 13,3 millions de personnes soit 20% de la population française.
D'où provient ce chiffre de 7,3 millions de personnes ? De calculs alambiqués d’identitaires mal intentionnés ? Non, de l’INSEE ! Et voici un tableau produit par le très pro-migrants quotidien « Le Monde » dans un article en date du 2 février 2017[1].
Nous voyons la part considérable qu’occupe les descendants d’immigrés originaires des pays du Maghreb et d’Afrique sub-saharienne et de Turquie, avec une tendance à l’accroissement puisque l’essentiel de l’immigration que nous recevons provient de ces régions et que la natalité de ces immigrations est bien supérieure à celle des populations européennes, qu’elles soient d’ailleurs immigrées ou non.
2.2. Economiquement, l’immigration n’est plus une chance pour la France
Une des caractéristiques fondamentales des flux migratoires en France, c'est leur hétérogénéité et il est légitime de s'interroger sur les impacts différenciés que « les » immigrations ont eus sur notre pays. Dans ce cadre, il faut traiter sans faiblesse du sujet ultra-délicat du bilan des migrations par pays ou zones d'origine. La grandeur de la France est de ne pas vouloir catégoriser les populations selon des critères ethniques (encore que nos services de police n'hésitent pas dans leurs signalements ou avis de recherche à mentionner le « type » ethnique de l'individu recherché) ou religieux mais sa faiblesse c'est de demeurer aveugle aux réalités qui s’imposent.
La vérité de notre vécu collectif est que toutes les populations qui se sont installées dans notre pays ne s'y sont pas - en moyenne – intégrées, économiquement, socialement et culturellement avec le même succès. Si ce constat est difficile à étayer en l’absence de statistiques ethniques, il existe d’autres chiffres permettant de l’établir de manière robuste : les statistiques par pays de naissance ou par nationalité. Celles-ci émanent d'ailleurs de l'une des plus incontestables institutions de notre pays : l'INSEE. Cette dernière nous livre à l'occasion de son dernier recensement, basé sur des chiffres de 2015, une analyse assez fine des bilans économiques et sociaux des migrations. Et les résultats sont sans appel.
Partant du postulat que notre office statistique est neutre et n’a pas de biais idéologique, les chiffres qu’il nous donne à connaître font apparaître des réalités à la fois simples et cinglantes pour les tenants de « l’immigration enrichissante ».
En résumé, les chiffres confirment notre intuition collective. Citons quelques extraits révélateurs du rapport de l’INSEE sur le dernier recensement :
- Taux de chômage
« En 2016, le taux de chômage des étrangers (20%) est deux fois supérieur à celui des personnes de nationalité française (9%). Cette différence est encore plus marquée pour les étrangers non originaires de l’Union Européenne (UE), notamment les femmes (27%) ».
Ou encore : « le taux d’emploi est faible parmi les immigrés originaires du Maghreb et de Turquie. En revanche la part des personnes au chômage en provenance de ces pays est élevée. Il en va de même de la part de personnes inactives mais non-retraitées (femmes au foyer par exemple) ». Le tableau suivant directement issu de l’Enquête Emploi de l’INSEE est frappant.
Il nous indique que les étrangers hors-UE sont près de trois fois plus au chômage que les Français et les ressortissants de l’UE en France, d’autres chiffres extrêmement alarmants nous montrent que le taux de chômage des jeunes étrangers hors-UE s’établit à plus de 31% !
Le recensement de l'INSEE sur le chômage des étrangers (hors UE) en France en 2015 nous indiquait des chiffres précis par nationalité :
Européens non-UE 27.130
Algériens 77.368
Marocains 67.783
Tunisiens 31.234
Autres Africains 102.121
Autres Nationalités 89.667
Total (hommes + femmes) 424.349
- Emploi des femmes
Très inquiétants également sont les chiffres de l’intégration des femmes étrangères au marché du travail. Le travail des femmes apporte non seulement une main-d’œuvre essentielle pour l’économie nationale mais représente un moyen d’émancipation, une contribution cruciale à la mobilité sociale d'un ménage et des moyens d’existence pour une famille monoparentale dont la mère est cheffe de famille.
La force de notre société repose sur une participation des Françaises au monde du travail qui est exemplaire.
Là encore, les chiffres du recensement nous livrent un constat alarmant : pour 3 femmes « Françaises de naissance » ayant un emploi nous en avons 1 qui est sans emploi, c’est-à-dire soit au « chômage », soit « au foyer » ou soit « inactive » pour d'autres raisons (handicap, etc.). Ce chiffre tombe à 1.6 pour 1 s’agissant des « Françaises par acquisition », c’est-à-dire celles ayant été naturalisées soit par mariage, soit grâce au « droit du sol » soit pour d’autres motifs. Il est de 2.7 pour 1 pour les Portugaises vivant en France, de 1,4 ; 1.8 et 1,74 pour 1 pour respectivement les Italiennes, les Espagnoles et les autres ressortissantes de l'UE vivant dans notre pays.
Ce ratio fléchit pour les femmes ressortissantes des autres pays d'Europe non-UE (Balkans notamment) à 0,8 pour 1 mais s’effondre totalement pour les ressortissantes des pays du Maghreb qui résident chez nous, tombant au niveau effroyable de 0,39 pour 1, avec un record pour les femmes turques à 0,22 pour 1 ! Les femmes de nationalités sub-sahariennes sont 0,9 à travailler pour 1 qui est sans emploi et 0,8 pour les femmes venant des autres pays du monde.
Ces chiffres ne cherchent nullement à stigmatiser les femmes qui ne sont pas en situation d’emploi mais expliquent de manière évidente les difficultés d'intégration de populations entières dans lesquelles le taux de participation des femmes au marché du travail est faible voire négligeable car, sans leur travail, la mobilité sociale des ménages populaires est devenue particulièrement difficile dans notre société. À cela s’ajoutent les difficultés spécifiques des familles monoparentales, également très nombreuses chez les immigrés, où l’absence du travail de la mère rend la vie extrêmement précaire.
- RSA et prestations sociales
Les chiffres relatifs au RSA et aux avantages sociaux accordés aux étrangers sont jalousement gardés par la CAF, sans doute trop gênée par ce qu’ils révèleraient. Toutefois, deux économistes immigrationnistes, Lionel Ragot et Robert Chojnicki, pouvaient affirmer dans un ouvrage de 2012 (L'immigration coûte cher à la France, qu'en pensent les économistes ?) et qui a gardé toute son actualité que « les étrangers de première génération recourent plus souvent que les natifs aux minima sociaux, notamment les Africains, dans une proportion presque quatre fois plus élevée ». Et ils ajoutent : « globalement moins diplômés que les enfants de Français, les fils d'extracommunautaires sont trois fois plus souvent au chômage que les natifs (24%, contre 8%). Et le pire est encore pour les jeunes, dont plus de quatre sur dix n'ont pas d'emploi (44%). Pas étonnant qu'ils soient nombreux à toucher le RSA ». Tout cela pour finir par nous dire que l’immigration est une chance pour la France !
- Accession à la propriété
L’INSEE pour sa part nous fournit des données sur un aspect essentiel de la situation sociale des résidents en France par pays de naissance. Il s’agit de la répartition des ménages selon leur origine et le statut d’occupation de leur logement.
Alors que 60% des ménages non-immigrés sont propriétaires de leur logement ce chiffre chute à 37% pour les ménages immigrés mais ce différentiel n’est a priori pas anormal. Ce qui l’est en revanche, ce sont les écarts considérables que nous constatons entre immigrés par origine géographique. Portugais, Italiens, Espagnols et autres citoyens de l’UE vivant en France sont propriétaires à respectivement 55%, 68%, 60%, 55%. Le chiffre chute à 38% pour les autres Européens souvent issus des Balkans et arrivés plus récemment. Mais que dire de cette immigration déjà ancienne du Maghreb dont les populations en France sont propriétaires à environ 25% et de celles d’Afrique sub-saharienne qui le sont à seulement 15% !
Il est intéressant de constater que, de façon exactement symétrique, le taux de recours aux logements HLM montre des réalités de mobilité sociale radicalement divergentes selon les origines. 13% des ménages non-immigrés sont en HLM, le chiffre est à peu près similaire pour les Européens de l’UE en France. Il monte déjà à 24% pour les autres Européens mais il atteint les chiffres ahurissants de 51% pour la population née en Algérie, 45% pour le Maroc, 39% pour la Tunisie, 48% pour l’Afrique sub-saharienne, 38% pour les Turcs et rechute à 20% pour les immigrés d’autres parties du Monde où figurent majoritairement les migrants d’Extrême-Orient (Chine et Viet-Nam).
Si l'on considère que l'accession à la propriété est un marqueur fondamental de l'intégration économique et de la mobilité sociale pour une population donnée, force est de constater qu'il existe de très fortes différences selon les populations d'origine et que celles-ci recoupent assez bien les statistiques sur la répartition par classes socio-professionnelles que nous livre également l’INSEE.
Voilà donc la réalité qui s’impose à ceux qui nous expliquent que :
- « Les immigrés font les boulots que les Français ne veulent pas faire ! »,
- « Nous avons besoin de main d’œuvre immigrée »,
- « Les migrants vont payer nos retraites ! »,
- « Les migrants viennent pour travailler », « Les immigrés finissent par s’intégrer »
- Ou encore le grandiloquent « l’immigration c’est l’avenir de la France »que certains illuminés viennent encore nous servir dans les studios de radio ou sur les plateaux TV.
3 – Analyse
Alors que l’on nous accuse souvent de délivrer des messages simplistes et caricaturaux les données de notre institut de statistiques nous donnent en fait raison :
- Oui, l’immigration a eu un effet positif sur notre pays lorsqu’il est sorti de la terrible saignée humainede la Grande Guerre et quand la France s’est reconstruite post-1945 ou encore durant les « Trente Glorieuses » avec ses taux de croissance élevés et les grands travaux d’infrastructures qui façonnaient le pays.
- Non, nous n’avons plus besoin de main-d’œuvre étrangère supplémentaire dans un pays férocement désindustrialisé qui compte déjà plus de 400.000 étrangers hors-UE sans emploi, chiffre qui bondit à environ 550.000 si l’on y ajoute les ressortissants de l’Union. Peut-être avons-nous besoin d’un petit nombre de spécialistes dont nous manquons dans des créneaux très spécifiques et en fort développement comme le numérique, des métiers industriels ou la recherche, mais les chiffres impliqués ici n’ont aucun rapport avec la véritable submersion migratoire que nos dirigeants nous imposent.
- Non, la mobilité sociale des immigrations en provenance du continent africain et d’Asie Occidentale n’est globalement pas bonnequand on en revient aux quatre indicateurs précédents (chômage, femmes en emploi, occupation de HLM et recours au RSA), fait que confirment les chiffres de la répartition des immigrés par catégories socio-professionnelles.
- Non, les immigrés hors-UE actuels ne « paient pas nos retraites » quand on voit leur taux de chômage et le taux de participation au marché du travail marginal des femmes et en particulier celles d’Afrique du Nord et d’Afrique sub-saharienne. Leur recours massif au logement HLM reflète des niveaux de revenus généralement modestes et donc faiblement contributeurs au financement de notre protection sociale (retraite comprise) en raison d’un bas niveau de cotisation salariale et patronale. Ils font très majoritairement partie des contribuables qui ne s’acquittent d’aucun impôt sur le revenu tout en jouissant des réductions de taxe d’habitation accordées aux ménages modestes. Enfin leur contribution à la TVA est plutôt réduite puisque comme pour tous les ménages à bas revenus de ce pays la part du budget familial consacrée à l’alimentaire est élevée et cette partie de la consommation est taxée à 5.5%. au lieu de 20%.
Ainsi, les immigrationnistes voudraient nous faire croire contre tout bon sens que des populations immigrées hors-UE déjà fortement au chômage, peu cotisantes, ne payant que peu ou pas d’impôts et fortement consommatrices de minimas sociaux seraient des contributeurs positifs ou même neutres à notre économie et à nos finances publiques. Mieux encore, il est parfaitement absurde d’affirmer que les nouveaux migrants qui arrivent nombreux par le biais du regroupement familial, d’un droit d’asile dévoyé et de régularisations au fil de l’eau pour ceux qui en sont déboutés contribueront davantage que leurs prédécesseurs à notre développement économique.
- Non, les nouveaux migrants pauvres ne dopent pas l’économie car « ils augmenteraient la consommation » et cela pour une raison assez simple. Notre appareil productif n’est pas bien positionné dans la production à bas coût à tel point que les économistes libéraux sont hostiles à une relance économique par la demande des ménages modestes et financée par davantage de déficits budgétaires ou sociaux car, disent-ils, ces ménages au pouvoir d’achat serré privilégient les produits importés à bas coût… et on ne peut pas leur en vouloir. Ainsi l’arrivée de migrants pauvres dont l’intégration est coûteuse pour nos finances publiques et dont le surcroit de consommation satisfait largement les producteurs étrangers n’a aucun sens sur le plan économique.
- Leur très faible capacité d’épargne, souvent absorbée par les transferts « au pays », rend l’acquisition d’un logement, élément non-négligeable de notre activité économique, rare.
Venons-en au vieillissement de la population comme argument pour justifier la venue de jeunes du reste du monde et plus spécifiquement d’Afrique. C’est effectivement un problème si l’appareil productif manque de main-d’œuvre en particulier de jeunes pour créer la richesse qui alimente les finances publiques. Mais comment invoquer un tel argument dans un pays qui compte encore, toutes catégories confondues, 6,3 millions de demandeurs d’emploi dont environ 500.000 jeunes de moins de 25 ans ? Le simple bon sens commande de déjà parvenir à mettre au travail les résidents existants, Français ou non, avant de se dire qu’on a besoin de plus de bras ! Et quand bien même l’on considérerait qu’en situation de plein emploi il reste un chômage dit « frictionnel » de 4% environ, cela signifierait qu’il y a de toute façon encore environ 3 millions de personnes à « mettre au boulot » avant de manquer de main d’œuvre en France.
4 – Conclusion
En conclusion et en dépit d’« études » produites par des idéologues, l’immigration en tant que telle, et en particulier celle de migrants pauvres et ne possédant pas de qualifications rares dans une économie encore en faible croissance et très loin du plein emploi, n’a aucune justification rationnelle si ce n’est celle de rester fidèle à une idéologie migratoire, dont la volonté de « changer de peuple » est le ressort fondamental.
[1]https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/02/08/sept-chiffres-sur-les-enfants-d-immigres-en-france_5076714_4355770.html