Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Refuser les Chaînes Financières de Notre Pays

Publié le 8 Janvier 2017 par Jean MESSIHA

Refuser les chaînes financières de notre démocratie

Par Jean MESSIHA

Dans sa dernière livraison électronique en date du 5 janvier 2017 intitulée « la France se dépêche d’emprunter avant le risque Marine le Pen », le journaliste Nicolas Gallant juxtapose deux faits stylisés en tentant de leur trouver un lien de causalité : les taux d’intérêt obligataires remontent et la victoire de Marine le Pen à l’élection présidentielle est de plus en plus crédible. L’analyse de Monsieur Gallant semble, a priori, imparable : la remontée des taux auxquels la France emprunte est la conséquence des spéculateurs qui voient dans la victoire du programme de Marine à la prochaine élection les prémices d’un risque systémique. En économie en effet, tout accroissement du risque se traduit par une hausse du coût associé, à savoir le taux d’intérêt.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, le journaliste de Capital, sans doute à son corps défendant, nous livre ici plusieurs informations … capitales. Tout d’abord, il nous informe que les marchés voient en Marine le Pen la prochaine présidente de la République, ce qui constitue un signe d’espoir pour tous les patriotes. Il est vrai que la date du 20 janvier 2017, celle de l'investiture de Donald Trump comme président des Etats-Unis, approche et que toutes les manoeuvres dilatoires déployées par le système politique, médiatique et financier pour l'en empêcher, ont échoué, au grand dame de leurs auteurs. De fait, comme la route vers l'investiture de Donald Trump est désormais totalement dégagée, les marchés se disent que Marine le Pen pourrait bien, dans quelques mois, connaître le même destin.

Gallant nous explique que cette hypothèse effraie et tout en présentant la hausse des taux qui y est associée comme le prélude à une catastrophe financière annoncée. A y regarder de plus près, toutefois, les chiffres disent en fait bien autre chose : la remontée des taux qui terrorise tant Monsieur Gallant est pour le moins modeste (quelques chiffres à droite de la virgule) et constitue le signe d’un attentisme inhérent à toute échéance électorale davantage qu’une défiance généralisée face à l’hypothèse d’une victoire de Marine le Pen. Le journaliste raisonne ainsi comme s’il commentait une hyperinflation des taux d’intérêt !

Sur le fond, Capital valide en un article toute l’analyse du Front National en matière économique. Le programme de Marine le Pen en la matière est construit sur un constat central, celui de la perte totale de souveraineté financière organisée et orchestrée par les partis au pouvoir depuis 40 ans. La loi du 3 janvier 1973 interdisant le refinancement de l’Etat par la Banque de France, complétée par l’autonomie accordée à cette dernière en 1993, le tout sanctuarisé par les traités européens depuis Maastricht, ont en effet eu pour conséquence de livrer la France pieds et poings liés au seul bon vouloir des marchés financiers. Ainsi et sans que cela n’ait l’air de lui poser le moindre problème, Monsieur Gallant énonce que ces derniers se sont rendus maîtres non seulement de notre politique économique, mais, ce qui est plus graves, de notre politique tout court !

Les développements du journaliste de Capital montrent de manière éclatante la résistance des faits face à l’idéologie. Voulant donner des gages de plus en plus importants d’allégeance à l’Allemagne, la France a fini par faire totalement sien le modèle monétaire et financier allemand. Ce faisant, elle est l’un des seuls pays occidentaux à avoir choisi d’accorder aux marchés financiers le monopole de financement de l’Etat. La Grande-Bretagne – sans parler des Etats-Unis – a veillé, malgré toutes les modes idéologiques, à ce que l’Etat britannique conserve plusieurs canaux de financement, tant publics que privés. C’est pourquoi, la Bank of England comme la FED américaine, continuent à s’autoriser des avances à leurs Trésors publics respectifs. Cela a permis à la Grande-Bretagne de contrecarrer les tensions sur ses taux obligataires au lendemain de la décision de Brexit. Les marchés, qui ne sont pas toujours aussi irrationnels qu’on le dit, n’ont d’ailleurs pas exagéré d’entrée de jeu la prime de risque face au Brexit, incluant dans leurs anticipations la menace de « bazooka monétaire » brandie par la banque centrale britannique pour faire face à d’éventuelles attaques spéculatives sur la Livre.

En France le choix du monopole de financement de l’Etat par les marchés financiers ne serait pas problématique si cette dépendance était confinée au seul marché financier national. En effet, l’épargne française excède largement les besoins de financement de notre économie. Un marché financier national permet à la première de répondre aux seconds. Or, à l’orée des années 90, nos élites, dans leur aveuglement antinational, ont décidé que le marché financier national devait être combattu parce que … trop national. Elles ont donc créé l’Agence France Trésor (l’AFT dans laquelle siègent, aux côtés des représentants de Bercy, des représentants de grandes banques ; on appréciera le côté juge et partie…). Sous l’objectif louable de placer la dette française « au mieux des intérêts du contribuable français », l’AFT a en réalité eu pour mission implicite de casser la structure encore nationale de notre marché financier et de fusionner celui-ci dans le marché globalisé. Ce que dénonce Gallant dans son article n’est ni plus ni moins que la conséquence de cette politique qui a abouti à ce que plus des deux tiers de la dette publique française est aujourd’hui détenue par des non-résidents. Ici comme ailleurs, la perte de souveraineté voulue par nos élites a été atteinte, au-delà de leurs espérances...

De ce constat deux enseignements peuvent être tirés :

  • Soit, on continue de penser la France comme un enchevêtrement de dépendances économiques, monétaires et financières et, dans ce cas, le seul projet politique possible serait celui de gérer la minorité légale du pays en donnant des gages à ses multiples tutelles ;
  • Soit au contraire, on en finit avec ce carcan en renouant avec la tradition historique de la France, celui de la grandeur d’un pays libre et souverain. Dans ce cas, le projet politique afférent consisterait à redonner à la France les moyens de sa liberté, à commencer par son indépendance économique, monétaire et financière.

C’est précisément ce dernier projet qui est celui de Marine le Pen. On objectera que cet objectif, bien que louable sur le principe, risque à court terme de provoquer des conséquences monétaires et financières incalculables. De telles conséquences, pour être indiscutables, ne sauraient toutefois être elles-mêmes érigées en projet ! Elles requièrent en revanche des mesures de sauvegarde temporaires, tel le contrôle des changes ou une restriction transitoire à la sacro-sainte liberté de circulation des capitaux, ce que, au demeurant, le programme de Marine le Pen, n’a pas manqué de prévoir. C’est cela ou bien l’acceptation que notre démocratie continue à être l’otage de la finance mondialisée.

Au final, dans son article, Gallant a eu le grand mérite d’énoncer, clairement et non sans un certain brio, les termes du chantage auquel le peuple français est soumis : s’il vote mal, c’est-à-dire pour des candidats qui n’ont pas fait allégeance à leurs tuteurs (UE, marchés, etc.), on lui promet du sang et des larmes ! Quel authentique démocrate peut accepter un tel procédé ? Quel démocrate sincèrement épris de liberté nationale pourrait ne pas refuser un tel diktat en votant pour la seule candidate qui incarne le refus de pareil asservissement ?

Commenter cet article
O
Tout ce que vous dites est faux. <br /> <br /> Pas plus que la FED que la BoE ne font des avances au Trésor de leurs Etats respectifs et le Quantitative easing engagé par la BCE n'a rien à envier avec celui de la FED ou de la BoE. <br /> <br /> De la même manière, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ne sont pas plus indépendants des marchés financiers que ne l'est la France qui d'ailleurs, emprunte à des taux inférieurs à ces deux pays... <br /> <br /> La seule arme du FN pour espérer convaincre les gens de la pertinence de ses analyses, c'est le mensonge. Pathétique. Heureusement, comme le montrent les sondages, ça ne prend pas et la sagesse populaire regarde avec dédain les "propositions miracle" du FN.
Répondre
A
Le patriotisme est un sentiment tres respectable et il se trouve qu'il m'habite egalement. Mais la question qu'il faut se poser est la suivante; peut-on pour tenter de legitimer son propos proferer des contre-verites? <br /> Cet interessant article nous dit, entre autre, que sous la pression des anglo-saxons nous aurions promulgue la Loi de 1973 afin de faire cesser le financement de l'Etat tandis que les Britanniques et les Americains poursuivaient cette pratique. C'est tout simplement inexact. Ni la Bank of England ni la Fed ne financent directement leurs gouvernements respectifs. Jean Messiha confond financement direct c'est a dire la souscription des obligations d'Etat par la banque centrale a l'emission et le Quantitative Easing c'est a dire le rachat massif de la dette de l'Etat sur le marche secondaire. Ce dispositif n'est d'ailleurs pas le monopole de la BoE et de la FED mais elle est pratiquee de facon massive par la BCE qui pour la France et la dette francaise demande a la Banque de France de proceder a ses rachats.<br /> Plus embetant et plus serieux c'est l'accusation a peine voilee de melange des genres entre nos hauts fonctionnaires et les banques d'affaire au sein de l'Agence Francaise du Tresor. Ceci est encore inexact. L'Agence Francaise du Tresor comme toutes les grandes agences de gestion de la dette publique dans le Monde s'est dotee d'un Conseil Consultatif qui se reunit 2 fois par an et qui est preside par un ancien et tres respectable haut fonctionnaire francais M. De La Rosiere. Cet organe qui n'a strictement aucun pouvoir de decision compte dans ses rangs des representants de fonds souverains etrangers et d'institutions financieres.
Répondre